ANTIGONE (S)
Peut-être que la création qui se commence était déjà contenue dans la précédente. Dans « L’Au-delà » de Didier-Georges Gabily (création janvier 2019 à la Cité Musicale-Metz), Silencieux rêve dans les limbes de son coma éthylique à une Antigone de supermarché.
J’ai ouvert, à La Fonderie du Radeau au Mans en février 2020, un premier atelier de lectures des traces d’Antigone et Oedipe à travers le temps. De Sophocle à Carson, en passant par Hölderlin et Brecht.
Aujourd’hui, au Grand Sault, je mets en regard deux variations de la pièce de Sophocle, Antigone ou la piété de Robert Garnier et Antigonick d’Anne Carson dans une nouvelle adaptation. Je nomme cette alliance Antigone(s). On y entendra des bribes d’une tragédie fracturée que l’on aime telles les statues abîmées dont la forme persiste. Du texte revisité ne nous parviendraient que des réverbérations sonores comme l’on disait jadis de la lumière envoyée par des astres éteints.
Ce côtoiement d'époques 2012, 1580, et la trace fantôme de l’origine sophocléene il y a plus de deux millénaires, révèle, ô combien, la culture classique a pu être témoin de l’inhumain ultime qui se rejoue inlassablement.
Soyons forts de nos espoirs qu’un jour se traduira dans la pragmatique de la conduite humaine personnelle, l’illumination, l’extase, le coup de foudre que sont de tels textes.
Laëtitia Pitz